Une alliance franco-polonaise pour contrer l'hégémonie allemande?
Le chef du gouvernement polonais, Mateusz Morawiecki, est arrivé mercredi à Paris, où en début d'après-midi il rencontrera le président français, Emmanuel Macron.
A cette occasion Deutsche Welle a interrogé le rédacteur de Tysol.fr, Patrick Edery, qui a souligné le fait que l'Allemagne avait un poids considérable en Europe et que mener uniquement des dialogues bilatéraux germano-polonais et franco-allemands étaient synonyme pour les deux pays de soumission à l'Allemagne.
"Choc des valeurs de deux Europe"
Le chroniqueur de Tygodnik Solidarność et le rédacteur en chef de Tysol.fr, Patrick Edery, dans une interview à Deutsche Welle, a souligné que le président français est conscient que «la Pologne peut être un bon partenaire pour la France».
- Patrick Edery souligne qu’avec le Brexit, le coronavirus, les incertitudes sur la succession de la chancelière allemande et "de grandes divergences dans la vision et le future de l’Europe" - d'un côté il y a des pays occidentaux avec des idéaux progressistes, et de l'autre, la Pologne et la Hongrie, qui sont déterminés à lutter pour les valeurs conservatrices - l’UE traverse une période de grave instabilité.
Cette instabilité est principalement due : « a eu une véritable collision frontale des idées de deux Europe. Donald Rumsfeld, ancien secrétaire américain à la défense, parlait de «la veille et la nouvelle Europe». La première étant la France, l'Allemagne, l'Italie et la nouvelle la Pologne, la Hongrie, la République tchèque - toute la partie de l'Europe centrale et orientale. À mon avis, il s’est trompé c’est tout l'inverse - la Pologne et la Hongrie sont «la vieille Europe» défendant les valeurs européennes, alors que la France et l'Allemagne sont la « nouvelle Europe » promouvant les valeurs progressistes ».
"Équilibrez l'hégémonie de l'Allemagne"
Patrick Edery, à la question de savoir si Paris et Varsovie seraient en mesure de construire un "bloc commun contre Berlin" après la fin du mandat d'Angela Merkel, a répondu qu’il est toujours difficile de savoir quels sont les véritables objectifs d’Emmanuel Macron mais qu'il était dans l'intérêt des deux pays d'avoir un partenariat qui "puisse contrebalancer l'hégémonie allemande " -
Selon le publiciste, l’objectif principal d’Emmanuel Macron, est la prochaine élection présidentielle dans laquelle Marine Le Pen sera la candidate la plus dangereuse pour lui. Et comme il devra faire face à des questions telles que l'immigration et l'islamisation. - On ne peut exclure qu'un rapprochement avec le pouvoir conservateur polonais puisse lui être utile pour renforcer son image à droite - souligne-t-il.
"Moscou en Europe ne voit que l'Allemagne"
Interrogé sur l'attitude de la Pologne et de la France face aux projets d'expansion de la Russie, Edery répond que c'est «le seul problème sur lequel Paris et Varsovie ont le même point de vue». Cependant, il souligne qu'Emmanuel Macron ne veut pas se couper complètement de la Russie, car ce n'est pas dans l'intérêt de la France.
- Ici, des questions idéologiques sont en jeu et le président et son environnement politique se déclarent opposés à la situation en Russie et en Biélorussie. Et cela est tout à fait conforme aux intérêts polonais. Nous devons comprendre que pour le moment Moscou ne voit que l'Allemagne en Europe et que seules les relations avec elle sont importantes pour le Kremlin, pour Patrick Edery.
- Auparavant, il y avait un consensus sur le fait que Berlin occupe une position dominante au sein de l'UE en matière économique et Paris en matière politique. L'Allemagne est désormais hégémonique dans les deux domaines au sein de l’U.E. et maintenant la France doit tout faire pour trouver sa place et son rôle en Europe - ajoute-t-il.
Le nucléaire pour rabibocher Paris et Varsovie?
Selon Patrick EDERY, l'une des questions très importantes qui pourrait rabibocher Paris et Varsovie est la coopération dans le domaine de l'énergie nucléaire, garantissant des "contacts bilatéraux à long terme"
- Ceci est d'une importance capitale pour le partenariat des deux pays. À mon avis, la France a de grands atouts dans ce domaine. Une telle coopération franco-polonaise serait également un argument sérieux dans la course mondiale en matière d'énergie, souligne Edery.
Interrogé sur la question du gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l’Allemagne, le rédacteur de Tysol.fr rappelle que depuis le début la Pologne a été défavorable à ce projet, mais qu’elle n'est pas en mesure de faire pression sur l'Allemagne toute seule.
- Tout comme la France d’ailleurs. La force combinée franco-polonaise serait plus importante. La coopération dans le domaine de l'énergie nucléaire y contribuerait grandement. Je pense que l'on peut dire que l'élaboration de plans conjoints dans le domaine de l'énergie nucléaire serait un contrepoids à Nord Stream 2 - souligne-t-il.
Tysol, KPA, source: Deutsche Welle