« Tremblez braves gens, nous n’en serons que plus puissants ! »
« La peur est mauvaise conseillère », disait Sénèque. Cicéron allait plus loin en disant que « le pire de tous les maux, c’est la peur ». Le christianisme n’en a pas fait meilleur cas, car la peur est la première émotion ressentie par Adam déchu de l’Éden. La peur est généralement le point de départ de la déchéance, de l’affaissement d’un homme, d’une société, d’une nation. On manipule aisément un homme qui a peur et un homme apeuré subira l’oppression, fut-il aux côtés de cent de ses congénères, lorsqu’un seul homme courageux se dressera contre elle. La peur est l’arme du tyran, et rappelons ce que disait le fou de Philippe II de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, à son seigneur : « Que ferais-tu, Philippe, si tous disaient non, quand tu dis oui ? » La réponse est aisée à deviner.
La peur est une arme, elle s’utilise, se manipule, s’éprouve et elle apparaît toujours dans l’ombre des grands mouvements de ce monde. Force est de constater qu’elle l’est également de nos jours dans ce qui est devenu le grand barnum covidien de l’angoisse et de la terreur. Voici donc que la 5e vague est sur nous, qu’elle fond sur l’Europe avec, dit-on, à la clé, plus de 500 000 morts à prévoir. L’UE se dit inquiète d’une « hécatombe », elle est « fulgurante » dans la voix d’un porte-parole du gouvernement français qui épuise un peu plus chaque mois sa liste de superlatifs pour désigner celle que l’on nomme déjà « LA PANDÉMIE », en majuscules s’il vous plaît. J’ose à peine évoquer le nouveau et terrifiant variant omicron qui transit dans leurs fauteuils tous les dirigeants de ce monde. Vous l’aurez compris, l’apocalypse est à nos portes, à nouveau j’ai envie de dire, et comme cela est désormais usuel depuis plus d’un an et demi, c’est au registre de la peur que se suspendent les rhétoriques gouvernementales. On noircit des cartes pour bien montrer que les cas de covid explosent, on prend des airs graves dans des discours sévères (sauf lorsqu’on délire sur Peppa Pig comme ce fut le cas de l’inénarrable Boris Johnson, allégorie de nos dirigeants médiocres), on annonce des chiffres terribles d’occupation des lits de réanimation, en pourcentages bien sûr pour cacher que nos hôpitaux n’en ont souvent qu’une dizaine à proposer. Puis, il va de soi qu’on masque les gens, pour qu’ils n’oublient surtout pas que le danger rôde au quotidien, que leur voisin est un méchant, qu’ils sont des tueurs en puissance, et ce, même en extérieur où il est avéré que le masque est aussi utile qu’une paille entre les orteils. Nos gouvernements exploitent la peur, elle nourrit leurs discours et ils l’exercent avec un plaisir presque orgasmique sur les peuples européens qui s’y vautrent avec une délectation peu surprenante. L’Europe vieillit, elle est constituée de cohortes sénescentes qui préfèrent la sécurité à la liberté et qu’il est aisé de terroriser, à fortiori car ces cohortes ont connu des décennies de confort ouaté et sont prêtes à céder leurs droits pour conserver la sûreté d’un lit douillet que les grands de ce monde leurs garantissent. L’Europe vieillit, mais elle a aussi une jeunesse déboussolée, une jeunesse qui a de plus en plus de mal à se projeter, à voir clair, et qui saisit d’un fatalisme propre à une époque où l’on n’arrive pas à voir loin à cause du tombereau de catastrophes attendues se dit : « À quoi bon lutter ? » L’Europe est malade, malade comme ses peuples, et il est aisé d’effrayer un malade quand on est son prétendu soignant et qu’on agite devant lui le spectre de la mort si on ne suit pas ses prescriptions, même les plus absurdes. Les gouvernements européens ont bien compris que les peuples sont faibles et qu’un peuple faible se domine par la peur, et il ne fallait qu’un prétexte pour la mettre aisément en place : la covid est celui-là. Les peuples européens ont choisi dans leur globalité d’abandonner leurs droits fondamentaux, et en particulier leur liberté. Rappelons à ce titre que la liberté est la première des valeurs françaises, avant toutes les autres. Ils ont choisi de les abandonner au nom de la sécurité et ils ont confié à leurs gouvernements les pleins pouvoirs en la matière. Plus exactement, ils l’ont fait, car ils ont eu peur, peur de ce qu’on leur promet depuis presque deux ans et peur de ce qu’on leur fait subir également. Me promenant régulièrement sur les réseaux sociaux, entendant ce qui se dit dans la rue, il est aisé de deviner que beaucoup préfèrent être en sécurité que libres, ce qui d’ailleurs se rapproche de ce qu’énonce le parti communiste chinois qui promet aux Chinois la sécurité contre leur liberté, sans se cacher. Et quand l’on écoute bien, beaucoup ont peur d’un confinement, de fermetures d’établissements, de restrictions de circulation, d’interdiction de voyager, ils ont peur de tout cela beaucoup plus que de la covid. Ils sont prêts à aller se faire vacciner non pour se protéger ou protéger les autres, rengaine un peu tombée en désuétude vue l’efficacité ric-rac du vaccin, mais pour éviter les risques ci-dessus mentionnés. Ils sont prêts à porter le masque en toutes circonstances, à se brûler les mains au gel hydroalcoolique, même à mettre papi et mamie dans la cuisine à Noël pour éviter, toujours, les risques ci-dessus mentionnés. Si vous les interrogez, ces gens vont vous dire que c’est la covid qui fait peser tous ces risques, mais la réalité, c’est que ces risques viennent du gouvernement. Ce n’est pas la covid qui décide arbitrairement qu’à tel niveau d’incidence on fait ci, qu’à tel autre on fait ça, et par ailleurs rien n’étaye l’utilité de ces mêmes mesures. L’utilité du masque en intérieur est risible lorsqu’on sait qu’en Polynésie l’épidémie a explosé du jour au lendemain malgré le port du masque inchangé sur la même période. En vérité, les gouvernements font peser des menaces absconses sur les peuples pour les conduire là où ils le veulent, les mener par le bout du nez en tendant une carotte d’un côté et en agitant le bâton de l’autre. La magie de ce tour de prestidigitation, c’est d’arriver à faire croire que ce qui vous fait trembler de peur, chers compatriotes européens, c’est la covid alors qu’en vérité ce sont bien vos dirigeants. Des dirigeants qui se vautrent dans le luxe de fêtes considérables, qui s’embrassent, qui vous crachent à la figure à chaque bise, à chaque masque non porté et qui s’en vantent en l’affichant ouvertement sur leur compte Instagram avant de supprimer quand ça fait mauvais effet. Ce qui vous fait trembler de peur, c’est de ne pas avoir le sacro-saint pass pour boire votre café au bar du commerce, boire votre pinard chez Dédé, voir la dernière comédie dramatique française ou assister au prochain concert de Wejdene. Mais ce n’est pas la covid qui tient votre sort entre ses mains. Ce sont bien vos gouvernements qui en faisant peser sur vous l’épée de Damoclès de la désocialisation, du chômage, de la misère, d’une « vie pourrie » pour citer un de nos « saints protecteurs », le tiennent et ils ne le lâcheront pas. Remarquez comme la notion de « vague », et surtout de « vague stratosphérique », à évoluer. On compte d’abord les morts, ensuite on se base sur les réanimations, puis sur les hospitalisations, puis quand ces chiffres sont excellents et pourraient justifier un abandon des mesures restrictives, on utilise les cas, et comme le vaccin miracle n’empêche nullement la transmission, c’est merveilleux, les peuples vont vivre ad vitam aeternam dans l’oppression par la peur.
Alors, je terminerai cette tribune par une citation qui dit toute mon opinion et tout mon combat : « Un peuple qui n’est pas libre n’existe qu’à moitié ». J’ajouterai qu’un peuple apeuré et qui n’est pas libre n’existe plus du tout.
Alexandre PAGE, docteur en histoire de l’art et écrivain