Rien de plus naturel en démocratie que l’alternance
Le monde politique s’agite à l’idée que le RN pourrait se voir confier la responsabilité de régions. L’obsession est tellement prégnante dans les états-majors des partis traditionnels que la lutte contre le RN est pratiquement devenue le seul programme politique à présenter, comme si la France n’avait pas d’autres soucis, comme si les Français n’attendaient pas autre chose du débat politique, comme si le débat devait se réduire à la conservation de postes.
Le syndicat des sortants s’agite
Pour l’occasion, on ressort du grenier l’épouvantail mité et chancelant du Front prétendument Républicain, on exhibe de puériles prédictions apocalyptiques, ultime profession de foi de sortants prêts à toutes les manœuvres, à toutes les manipulations sordides et aux alliances les plus crapuleuses dans l’espoir de plus en plus ténu d’endiguer le vote populaire.
Empêcher l’adversaire de faire la preuve de sa compétence
On comprend aisément que, à la veille de la présidentielle, le pari soit également d’empêcher le mouvement national de montrer sa capacité à gérer une grande collectivité. Il est facile d’imaginer que la preuve par l’exemple serait, à l’image de la Lega en Italie, un atout formidable et un gage de crédibilité imparable pour l’opposition nationale. Mais qui peut croire ceux qui expliquent que Thierry Mariani, ancien ministre, élu et réélu à tous les niveaux politiques, serait incapable de conduire un exécutif régional ?
Et la démocratie dans tout ça ?
Ce qui devrait indigner, c’est d’abord que le premier parti d’opposition et peut-être le premier parti de France soit privé, par le fait de manœuvres d’appareil ou d’un mode de scrutin inique, de sa légitime représentation locale et même parlementaire. A l’heure d’une crise de représentativité que les Gilets Jaunes ont fait exploser, sa juste représentation dans les collectivités intermédiaires contrebalancerait cette anomalie démocratique.
Mais plus largement, les démocrates devraient considérer l’alternance comme un mécanisme naturel en démocratie. Elle en est la respiration, le souffle, la preuve de vie. C’est elle qui permet de rouvrir les dossiers, de rompre avec certaines habitudes confortables, de secouer les inerties, de susciter des nouveaux dynamismes, de faire émerger de nouveaux visages.
A l’inverse, c’est l’absence d’alternance qui caractérise les systèmes politiques sclérosés, ou pire, totalitaires.
On reconnaît une démocratie à la capacité de la majorité de respecter l’opposition et sa vitalité au libre jeu de l’alternance. De ce point de vue, la stratégie d’injures qu’a décidée LREM à l’égard du Rassemblement National dans cette campagne, comme les combinaisons de circonstances qui se préparent pour contrecarrer la volonté populaire de changement doivent être considérées comme la déplorable fuite en avant d’un système à bout de souffle.
Philippe OLIVIER, député européen & conseiller de Marine Le Pen