Irena, gracieuse et élégante, avec le port de tête altier pour une femme à la noblesse d'âme.

Irena actrice, chanteuse de jazz, le swing dans la voix. Star du Music-hall au tempérament de guerrière. Irena Anders, l'incarnation de la femme Polonaise, un iceberg au cœur de volcan. Une beauté qui lui vaudra d'être surnommée la "First Lady de l'armée Polonaise". 

Voici son histoire:

Irena Anders est née à Bruntál, en République Tchèque le 12 mai 1920. Elle est la fille d'un mariage polono-ukrainien. Son père Mykoła Jarosewycz est aumônier orthodoxe, sa mère Ołena Nyżankiwska est issue d'une famille de musiciens. Ses oncles, Ostap et Oleksandr, sont : compositeur pour le premier, et chanteur d'opéra pour le second.

Irena grandit dans un contexte familial où se mêlent arts, ésotérisme et spiritualité. Elle et ses parents emménagent à Lwów dans le quartier de Kulparków, où son père travaillera comme aumônier dans un sanatorium pour malades mentaux. C'est une enfant studieuse. 

En 1929, elle rentre au Conservatoire de Lwów, où elle étudie le chant, la musique et le solfège. Elle aura pour professeur son grand cousin Nestor, fils de son oncle Ostap. 

A la fin des années 1930, elle devient soliste pour un groupe de jazz : le Jabcio-Jazz. Elle choisit Renata Bogdańska comme nom de scène et court les revues, les théâtres et les cabarets de Lwów, Cracovie et Varsovie. 

Mais voilà que la guerre éclate et que sa jeune carrière se voit chamboulée. Suite à l'agression soviétique de la Pologne, elle perd ses cachets à Varsovie et Cracovie. 

C'est au théâtre de revues Ref-Ren de Feliks Konarski à Lwów qu'elle trouve un peu de réconfort. Elle y chante des chants patriotiques et militaires polonais afin de galvaniser les habitants de la ville. En parallèle, Henryk Wars, meneur du jazz band Tea-Jazz, la prend pour être soliste. 

Elle vit très mal l'occupation soviétique de Lwów et condamne l'attitude des soldats de l'Armée rouge ainsi que des officiers soviétique, pour qui les femmes ne sont que du butin : ils sont des gougeats, des malotrus, des gens peu éduqués et mal dégrossis.

Quand en 1941 l'armée allemande lance l'offensive contre les soviétiques, elle et son premier mari, l'acteur Gwidon Borucki, fondent le groupe de musique anti nazis "Polska Parada". Ils feront des concerts clandestins, les manifestations culturelles polonaises étant interdites dans les territoires occupés.

Après que Staline ait consenti à libérer le Général Władysław Anders et les prisonniers de guerre Polonais, suite à des pressions des Alliées, le dit général fonde le 2ème corps d'armée Polonais. Elle s'y engage et oblige Gwidon à la suivre. 

Elle prendra part aux combats en Irak, en Syrie, en Palestine mandataire, en Libye et en Italie lors de la campagne d'Italie. Une femme guerrière qui, entre les combats et les décomptes des morts, chantera pour les soldats Polonais. Elle sera faite capitaine. Le 21 mai 1944, suite à la prise du Monte Cassino par les troupes polonaises, elle chantera devant les soldats alliés "Czerwone Maki na Monte Cassino" : équivalent polonais de "Lili Marlène". 

Après guerre, en 1946, elle tournera dans deux productions cinématographiques, parmi lesquelles Wielka Droga de Michał Waszyński, organisée et financée par le Centre de la culture et de la presse du 2e corps polonais. Le film raconte l'épopée des soldats du 2e corps pendant la guerre. Elle donnera la réplique à Albin Ossowski.

L'année suivante, elle part pour l'Angleterre, où en 1948 elle épouse en seconde noce, le Général Władysław Anders. 

Deux ans plus tard, elle donnera naissance à une fille : Anna Maria. 

Dans les années 1950-1970, elle tournera lors de galas de la Polonia (diaspora Polonaise), notamment en Grande Bretagne, aux États-Unis, au Canada, en France, en Italie, en Australie et en Israël pour des commémorations de la Shoah. 

À la chute du mur de Berlin en 1989, elle acquiert une propriété en Pologne ou elle passera quelques temps avant de repartir à Londres. Entre 1995 et 2010, elle se rendra en Pologne, principalement comme invitée pour les cérémonies officielles. 

Parmi ses distinctions, on compte la Złoty Krzyż Zasługi (Croix d'or du mérite), la Krzyż Pamiątkowy Monte Cassino (Croix de la bataille de Monte Cassino).

En 2006 elle reçoit la Srebrny Medal "Zasłużony Kulturze Gloria Artis” (équivalent polonais des Chevaliers des Arts et des Lettres) et en 2007, la Krzyż Komandorski Orderu Odrodzenia Polski (Commandeur de l'Ordre de la Polonia Restituta). Ces deux dernières distinctions, lui seront remise par le Président Lech Kaczyński. 

En 2010, elle soutient à la Présidentielle le Président Bronisław Komorowski. Elle confiera quelques semaines après l'élection que c'était une erreur et s'être trompée sur le personnage. 2010, dernière année où elle viendra en Pologne. 

La guerrière épuisée, pousse son dernier souffle à Londres le 29 novembre 2010. 

Ses obsèques seront célébrées en l'église polonaise de Saint Andrzej Boboli de Londres, ses cendres sont enterrées dans le cimetière militaire Polonais de Monte Cassino, auprès de son époux le général Anders.

Une dame aux antipodes de Camélia Jordana ; une grande patriote.

Une grande dame, qui contrairement à Diam's, ne se soumettra pas. 

L' anti Yseult, celle qui passe son temps à geindre à défaut d'avoir du talent.

Sa fille, Anna Maria Anders sera élue sénatrice de Pologne en 2015 et secrétaire d'État dans le gouvernement de la Première Ministre du PiS Beata Szydło. 

Elle soutient Andrzej Duda et Jarosław Kaczyński. Anna Maria était une proche amie du sénateur Républicain John McCain, et une amie de Mateo Salvini de la Lega (parti patriote italien).

Elle est aujourd'hui ambassadrice de Pologne à Rome, nommée par le Président Andrzej Duda.

C'était l'histoire de la plus belle femme de Pologne, une amazone des temps modernes, la Marlène Dietrich des Carpates. Une beauté sublime, une femme magnifique au grand cœur et au courage hors normes. Un guerrière à la beauté fatale, Irena Anders la First Lady de l'armée Polonaise.

(Pour aller plus loin, je vous invite à vous procurer, si vous arrivez à le trouver en français, le livre d'Anna Maria Anders "Córka Generała i Piosenkarki", en français "Fille du Général et de la Chanteuse" qui retrace l'histoire de la famille Anders).

Florian Marek.